samedi 17 octobre 2009

Israel et Palestine: l'horloge tourne, et il n'y a pas qu'elle qui avance

La place et l'importance politique des partis religieux en Israel tiennent au fait que les 2 grands partis ont eu rarement la majorité à eux seuls; de ce fait, ils ont fait alliance avec les partis (politiques) religieux qui leur ont soutiré divers avantages au fil des ans, pour renforcer leur assise politico-religieuse. Ceci explique, selon Chomsky, l'influence de ces partis religieux.

Pour imaginer le devenir du conflit israélo-palestinien et sous-peser ses chances de résolution, d'une part, il faut tenir compte du poids de la religion de part et d'autre, religion qui renforce le dogmatisme de chacun des 2 camps; et d'autre part, il faut tenir compte d'un autre facteur peu mis en avant, en raison sans doute de l'échelle de temps associée : ce facteur, c'est le taux de natalité. A vue de nez, le taux de natalité est le plus élevé précisément au sein des franges les plus religieuses des 2 camps. Dit autrement, plus le conflit dure, et plus il a des chances de s'envenimer !

Renseignements pris, j'ai découvert la publication Les enjeux démographiques en Palestine après le retrait de Gaza (mi-2006). Son auteur, Youssef Courbage, démographe (il a travaillé avec Emmanuel Todd), chercheur à l'Institut national d'études démographiques (INED), y analyse l'impact démographique dans le cadre israelo-palestinien. Il indique que "Du fait de la précocité des mariages et du rejet de la contraception et de l’avortement, les ultra-orthodoxes [juif] battent le record mondial de fécondité (7,6 enfants par femme ) 11 et dépassent de loin celle des autres Israéliens juifs et des Palestiniens d’Israël (4,02 en 2004).
[...]
L’hyperfécondité « instrument de combat » ? Kadosh, le film d’Amos Ghitaï (1999), montre des religieux pour qui la procréation n’obéit pas seulement aux préceptes bibliques, mais aussi à une stratégie de pouvoir, de revanche sur les laïques par la démographie."

Par contre, la natalité des palestiniens semble marquer le pas. "En 2000, la fécondité chute de 6,25 enfants par femme à 4,18, perdant ainsi le tiers de sa valeur. En 2001-2003, il n’y a pas de récupération des naissances, la fécondité tombe au-dessous de 4 , à 3,87, et devient plus basse que celle des Palestiniens en Israël (4,15 en 2003). Tout un symbole."
Il écrit plus loin "Le choix du couple palestinien – l’avenir de ses enfants plutôt que la cause nationale – semble aller désormais vers la famille restreinte, au grand dam des dirigeants. On ne veut plus de ces familles de 12 enfants (2 pour le couple, 10 pour la cause) qui avaient, dit-on, les faveurs de Yasser Arafat. Le changement de valeurs – du natalisme au malthusianisme – est patent, mais il demeure discret."

Ces chiffres sont éloquents, même si, pour se faire une idée plus complète du tableau, il faudrait avoir les chiffres de la frange palestinienne qui adhère le plus à la cause nationale, ces familles, qui, disait-on, faisaient des familles de 12 enfants (2 pour la famille et 10 pour la cause) qui avaient, dit-on, les faveurs de Yasser Arafat.
Bref, la natalité baisse en Palestine, mais les palestiniens sont encore beaucoup plus nombreux que les colons israéliens (les israéliens forment 20 % de la population en Cisjordanie en 2005).

L'analyse de la démographie n’a pas réponse à tout, et Youssef Courbage peut seulement extrapoler différents cas d'évolution de la démographie et imaginer ses impacts.

Chaque camp semble jouer à un jeu différent. Les israéliens jouent apparemment au jeu de go, en disposant leurs colonies en Cisjordanie pour prendre des positions stratégiques. Par contre, les palestiniens ne peuvent pas répliquer de même, et semblent jour au poker, en tentant des coups payés cash, ou aux dominos, en espérant bloquer l'adversaire (ou saper son moral, ce qui revient au même), pour déclencher un effet de bascule et gagner la partie. Mais quoiqu'il en soit, l'évolution de la démographie joue un rôle prépondérant ici, comme une N-ième version de la guerres des berceaux; rappelons que Emmanuel Todd a prédit « la décomposition de la sphère soviétique » dans son premier livre, La Chute finale (1976) en analysant les systèmes familiaux russes (analyse qui va au-delà de l'étude de la natalité).

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